24 Mars 2014
Les Francs-maçons ont quelquefois des difficultés à exprimer l’intérêt de leur engagement maçonnique : « Je ressentais une sorte de manque, comme un désir de donner de la cohérence à ma vie. J’ai rencontré un ami dont le propos a piqué ma curiosité. J’ai lu des livres...Aujourd’hui mon entourage me dit que, depuis que suis en Franc-maçonnerie, j’ai changé, que je suis plus attentif aux autres, plus accessible, plus ouvert… »
De fait, la Franc-maçonnerie se considère assez généralement comme une communauté fraternelle qui partage des secrets convenus et qui contribue au progrès de l’humanité par le développement des qualités morales et spirituelles de ses membres.
Cette approche de la Franc-maçonnerie est évidemment très imprécise, trop large et trop équivoque, pour permettre de cerner le sens et la portée de la Franc-maçonnerie, car si développer les qualités morales et spirituelles de l’humanité est un objectif louable, encore faut-il vérifier la crédibilité de la démarche.
D’où une série de questions :
La Franc-maçonnerie anglo-saxonne définit la Franc-maçonnerie comme « un système particulier de morale enseignée sous le voile de l’allégorie au moyen de symboles »
Il est important de bien appréhender cette définition ;
Et notamment de ne pas détacher le mot « morale » qui, ici, correspond au sens le plus général d’« art d’agir de façon juste ».
Car la morale visée n’est pas la morale ordinaire mais « un système » de morale « particulier »
Aussi en lisant correctement la définition ci-dessus, il apparaît que la Franc-maçonnerie propose « un système particulier » de morale « enseignée sous le voile de l’allégorie au moyen de symboles » ;
Autrement dit une morale cachée, une morale ésotérique, une façon de « faire » à laquelle les Francs-maçons ne peuvent accéder que par l’effet des instruments initiatiques que sont l’allégorie -qui « nomme » l’invisible (image)- et les symboles -qui « dévoilent » et donc « rendent perceptible », l’invisible (ressemblance).*
*Rappelons que la Franc-maçonnerie est née du Métier de bâtisseurs d’édifices religieux, glorificateurs des possibilités créatrices, esthétiques et morales, d’une humanité libre au service de Dieu, Grand Architecte de l’Univers ; c. à dire au service du « faire humain dans la ressemblance divine », le 7ème jour de la Création. (Genèse)
NB. : Cette morale de l’invisible est une spécificité dont la Franc-maçonnerie a hérité de son origine opérative. Pour les artisans et artistes bâtisseurs d’édifices religieux, le respect de la morale et de la bien pensance sociétale était une façon discrète et nécessaire, de « se fondre » dans la société médiévale, (de se faire oublier, de ne pas faire de vagues, pourrait-on dire), pour bénéficier, dans un climat de relative tranquillité, des « franchises » et de « la liberté de création » accordées exceptionnellement aux hommes du Métier, liés par serment à leur Confrérie et placés dans une relation transcendantale directe avec « Notre Seigneur Jésus Christ et son Eglise »
Cette situation particulière de liberté et de création était induite par cette référence directe que l’artisan/artiste créateur entretien avec la Création libre dont l’inspiration première est toujours d’origine divine, (Il en était de même pour « la Chevalerie » s’agissant du Métier des armes) car l’homme Libre s’inspire directement du Divin (l’Esprit parle, le Génie parle) et ne rend de comptes qu’à Dieu.
*Rappelons que le statut d’homme libre était au moyen âge un privilège exceptionnel de la chrétienté.
Rappelons également qu’au début du XVIIe siècle, existait en Franc-maçonnerie spéculative, à côté du rite anglican dit « des anciens devoirs », un rite presbytérien dit « du (des) mot(s) de maçon » qui traduit le rattachement direct du Franc-maçon à la transcendance divine, c. à dire un rattachement sans intermédiaire ; le protestantisme ayant proclamé que tout homme avec sa Bible est Prêtre, au titre du Sacerdoce universel.
Par la suite une « détestation » commune du pouvoir papal, a conduit les anglicans et les presbytériens à réunir les deux rites dans le courant commun -qui sera dit plus tard « modern »- de la première Constitutions de 1723, établie comme l’on sait par le pasteur écossais « presbytérien » James Anderson avec l'appui du pasteur et scientifique « anglican », Desaguliers.
De nos jours, dans nos sociétés occidentales, les « convictions » religieuse sont très affaiblies* de telle sorte que la spiritualité, autrement dit la relation de l’homme avec le divin, est une dimension humaine de plus en plus ignorée.
*Si la revendication confessionnelle de la croyance en Dieu continue à être présente à titre de référence identitaire sociétale, la dimension spirituelle de la foi est devenue sociologiquement plus marginale. C’est la raison pour laquelle il convient de distinguer la référence à la croyance, qui subsiste par convenances et habitudes sociales, d’avec la dimension « vivante » de la foi qui n’est plus vraiment perçue comme une capacité d’accès à l’Être, sachant au surplus que très peu de gens se soucient de l’Être de nos jours ?
*Nietzsche (fils de Pasteur) nous a brusquement éveillés à la prise de conscience de la disparition progressive de la dimension spirituellement vivante de Dieu, lorsqu’il a lancé cette proclamation qui fit longtemps scandale : « Dieu est mort »
Ce n’est évidemment pas chez lui, une provocation irresponsable. C’est même totalement l’inverse. C’est un cri de douleur, un cri d’alarme, la révélation d’une situation inouïe, d’un événement inimaginable et catastrophique, d’un crime monstrueux perpétré par l’avènement du nihilisme contemporain, glorificateur non plus de Dieu, mais du « dernier homme », « du plus hideux des hommes », archétype d’une humanité faible, bouffonne, moutonnière et sécuritaire, totalement décadente en raison précisément, de l’oubli de la dignité et de la grandeur spirituelle de l’homme.
Par ce cri, Nietzsche a parfaitement pronostiqué, dès la fin du XIXème siècle, la disparition de la spiritualité vivante et l’avènement de cet utilitarisme sociétal, totalement installé de nos jours, pour qui les valeurs humaines sont rabattues à l’horizontale, dans la veule et grégaire dimension d’un troupeau cherchant à se rassurer. (Il n’est même pas question ici de grégarité dans « l’intérêt » du troupeau mais plutôt d’une grégarité de soubresauts, agitée et erratique)
Pour Nietzsche la vocation « divine » de l’homme n’a pas disparue. Loin s’en faut, car pour lui « L’homme est un pont entre l’animal et le surhomme »
Aussi s’agissant de l’annonce de la mort de Dieu, il faut comprendre que « seul le Dieu bon (de la morale ordinaire) est disqualifié »
C’est le « faux » dieu de la superstition et de la pitié qui a disparu –déclare-t-il en substance- car ce Dieu a été englouti, « nihilisé » par les gémissements de tous les « apôtres du ressentiment » dont les supplications incessantes et obscènes, adressées à la superstition divine, transpiraient des aspirations indignes de l’humanité. Dieu s’est effacé à force de n’être plus appelé que par la petitesse, l’égoïsme, la poltronnerie et le désir de jouissance des « derniers hommes », qui ne priaient que pour satisfaire leurs vanités et leurs égoïsmes, oubliant (faisant disparaître) de ce fait, le Dieu d’Amour et de Vérité.
« Dieu est mort, c’est sa pitié des hommes qui l’a tué » écrit-il en précisant les motifs de cet assassinat : « L'assassin, l'homme réactif, ne pouvait tolérer cet indiscret, ce miséricordieux qu'est Dieu. Il l'a donc tué. Mais rassurez-vous, il y a désormais de la place pour de nouveaux Dieux »
Chez Nietzsche, spiritualiste mal compris, on retiendra surtout l’une des plus formidables sollicitations spirituelles, à la fois heuristique et eudémonique, qui ait jamais été écrite :
"Dieu est mort ! Dieu reste mort ! Et c'est nous qui l'avons tué ! Comment nous consolerons-nous, nous, meurtriers entre les meurtriers ! Ce que le monde a possédé de plus sacré et de plus puissant jusqu'à ce jour a saigné sous notre couteau ; qui nous nettoiera de ce sang ? Quelle eau pourrait nous en laver ? Quelles expiations, quel jeu sacré serons-nous forcés d’inventer ? La grandeur de cet acte est trop grande pour nous. Ne faut-il pas devenir Dieu nous-mêmes pour, simplement, avoir l’air dignes d’elle ? Il n'y a jamais eu d'action plus grandiose, et, quels qu'ils soient, ceux qui pourraient naître après nous appartiendront, à cause d'elle, à une histoire plus haute, que jusqu'ici, ne fut aucune histoire !» (Le Gai Savoir)
Nietzsche n’était pas Franc-maçon, et pourtant, il serait difficile d’exprimer mieux que ci-dessus, la grandeur et la sublimité de la spiritualité maçonnique du Maître maçon.
À quoi se réfère en effet cette volonté de « devenir Dieu nous-mêmes, pour simplement, avoir l’air dignes » de la dimension inconnaissable du vrai Dieu, sinon à une recherche sublime d’un Dieu sublime, d’un Dieu non anthropomorphisé, d’un Dieu ni grossièrement mesquin, ni grossièrement superman, mais un Dieu noblement inconnaissable, dont nous ne pouvons que nous montrer digne par respect, en réalisant pour lui, « l’œuvre divine » qui est la part de ce qui existe de liberté, de grandeur et de noblesse chez l’homme.
La morale ordinaire n’est pas l’objet de la Franc-maçonnerie pour la bonne raison que cette dernière est considérée comme acquise –à priori- en préalable à la réception de tout membre dans la Confrérie. L’admission en Franc-maçonnerie suppose en effet que l’on soit reconnu « Libre et de bonnes renommée » avant d’être admis parmi les maçons.
Ce respect de la morale ordinaire, le Franc-maçon ne l’abandonne pas une fois reçu dans l’Ordre, puisque lorsqu’il est interrogé il répond à la question :
« - Dites-moi ce que c’est qu’un maçon ? C’est un homme libre, fidèle aux lois, le frère et l’ami des [hommes] vertueux. »
Mais s’il est acquis, (et d’ailleurs disciplinairement sanctionné), qu’en société, un Franc-maçon sait se conduire en homme convenable, paisible et respectueux des lois, il est évident que le respect des conventions et de la morale sociétale et à fortiori le moralisme, ne sauraient satisfaire la vocation initiatique de la Franc-maçonnerie.
Pour des raisons initiatiques la Franc-maçonnerie exige que ses candidats se trouvent en capacité d’admettre, sans restriction mentale aucune, que l’Esprit est la dimension la plus essentielle de l’humanité et qu’il y a quelque intérêt supérieur à en expérimenter la présence.
D’où cette exigence fondamentale de la Franc-maçonnerie régulière, qui est celle de la « croyance dans le GADLU et sa volonté révélée » (« Basic principe » n°2 de la GLUA)
Et notons bien que cette exigence n’est pas un simple désidérata administratif, mais une exigence de fond ; ce qui signifie clairement que ne peuvent être initiés, au sens de la Franc-maçonnerie régulière, ceux pour qui la Franc-maçonnerie n’est qu’un système sociétal dénué de dimension transcendantale.
Au demeurant l’exigence de la croyance en Dieu va plus loin car elle signifie aussi, qu’au-delà des incroyants assumés, l’initiation ne peut être effective non plus pour ceux, pour qui le terme de « spiritualité », n’est pas une « relation vivante » mais une simple référence culturelle*
*Certains en effet s’imaginent qu’ils touchent à la spiritualité lorsqu’ils réfléchissent à des questions de morale, de métaphysiques ou même d’organisation idéale de la société.
D’autres croient toucher à la spiritualité chaque fois qu’il est question de vertus d’amour, de bienfaisance et de fraternité.
D’autres enfin s’imaginent qu’ils appartiennent au monde de la spiritualité à partir du moment où ils proclament leur rattachement à une religion instituée.
Mais, dans les hypothèses ci-dessus, c’est encore et toujours de convenances sociétales et de références culturelles extérieurs dont il est question. La spiritualité demeure absente, car la spiritualité n’est jamais une affaire de « savoirs », mais une façon de « connaître », de percevoir et de laisser vivre, la relation immano-transcendantale de l’homme avec le divin (ou, autrement exprimé, la dimension divino-humaine de l’humanité).
(Cf. : INITIATION ET FRANC-MAÇONNERIE CULTURELLE - Le blog de le-myosotis.de.septimanie.over-blog.com :
« L’on appelle Tradition maçonnique, les règles que la Franc-maçonnerie a élaborées à partir d’un fond immuable de figures initiatiques dont l’humanité est ontologiquement détentrice depuis l’origine des temps.
L’Initiation est aussi vieille que l’humanité car elle est aussi vieille que l’Esprit, dont elle est « Fille » (Comme exemple de cette ancienneté : on se souviendra du mythe Grec de la déesse Athéna, sortie casquées et armée du crâne de Zeus, après que celui-ci ait été fendu, à la demande de Zeus, par la double hache d’Héphaïstos, le Dieu forgeron boiteux, époux d’Aphrodite »)
Comme nous l’évoquions dans le texte (en lien) ci-dessus, en restreignant son approche de la Franc-maçonnerie à l’imitation de figures rituéliques convenues -alors que l’initiation correspond fondamentalement à une prise de conscience de la présence et de la puissance de l’Esprit en chacun des plans de la création manifestée - la Franc-maçonnerie mondaine méconnaît l’initiation effective.*
*C’est en cela que l’on a pu dire à juste titre qu’elle est la Franc-maçonnerie « de la voie substituée »
À chaque étape de l’initiation correspond en effet une « marche vers l’Orient » :
Partant du plan infra-terrestre, où « dans l’invisible d’en bas » (Hadès), l’Esprit est la potentialité inaccomplie (le germe enfoui dans la matrice Terre, lettre « B ») ; on retrouve l’Esprit extériorisé au plan terrestre dans la Beauté et la Gloire manifestée de la Lumière visible (Épiphanie, lettre « J ») ; puis on la rejoint au-delà des manifestations temporelles (et donc mortelles), dans la pureté et la gloire du plan céleste (l’invisible d’en-Haut) là où « l’Esprit est le Seigneur », le Verbe de Dieu, la Première Donation divine, l’Expression de Sa Sagesse et de Son Intelligence.
(La tripartition ci-dessus peut également être revisitée selon des ternaires homologues dans les catégories : - religieuses : Corps, Âme, Esprit ; -alchimiques : Terre, Air et Eau, Feu ; –psychiques : Inconscient, Conscient, Surconscient ; -géographiques : Occident, Midi, Orient ; etc.)
Rappelons ici ce que nous écrivions in fine dans *STATUTS ASSOCIATIFS ET RÉGULARITÉ DE L’ORDRE MAÇONNIQUE - Le blog de le-myosotis.de.septimanie.over-blog.com
« La puissance souveraine de l’initiation maçonnique.
C’est pour parvenir à la « Connaissance initiatique » que de tous temps, l’humanité en appelle à la puissance méconnue des rites initiatiques et plus précisément, dans nos sociétés occidentales, à la puissance méconnue des secrets et méthodes de l’initiation maçonnique.
L’initiation maçonnique en effet, dès lors qu’elle est « régulière » et non pas « un simulacre de bateleurs de foire », donne accès à « la Connaissance »
Cette « connaissance » est certitude.
Elle permet à un initié de témoigner qu’en profondeur, sous la grossière matérialité du monde, ce n’est pas « la force brute et contingente des apparences » qui conduit le monde, mais la force « des valeurs » révélées aux hommes par l’Initiation. »
Sans un engagement total du corps et de l’âme tel que l’exige la Voie initiatique « régulière », nul ne franchit « la porte des Dieux » pour atteindre « le Royaume de la Connaissance »
*La Connaissance correspond à la conjonction/dépassement des antagonismes et des oppositions, aux épousailles des contraires qui engendrent l’Horus, le Fils de la Lumière, le Christ)
L’Initiation spirituelle (ainsi que nous le verrons plus avant à propos de la puissance effective « des serments et des châtiments associés ») exige donc une quête intime « du Soi » ; le but de la démarche initiatique étant de rejoindre, l’omniprésence, l’omniscience et l’omnipuissance* de cette « résonnance originelle de l’âme » que Michel Henry, philosophe de la phénoménologie de la Vie et de l’essence du Christianisme, décrit comme « l’auto-donation pathétique de la Vie à elle-même » et que la chrétienté appelle « l’Esprit » en l’homme.
* l’omniprésence, l’omniscience et l’omnipuissance, expriment la totalité des potentialités divines ; potentialités que l’on ne doit pas assimiler à une grandeur superlative (le plus grand, le plus parfait etc.), mais à une absence totale de détermination, car l’Esprit est immuable et sans attributs dans son essence.
C’est cet Esprit premier, par nature immuable, qui s’incarne par diffusion dans les plans inférieurs du corps subtil et du corps mental (conscience) puis du corps physique ; revêtant au passage les formes et les attributs des corps concernés et leur donnant vie.*
*Dans ces « corps » l’Esprit manifeste aussi bien la Rigueur de la Loi, que la Miséricorde de l’amour divin, au service de la Vie, et d’une manière générale toutes les formes et accords possibles entre les complémentaires que la Bible symbolise par ces deux personnages (deux lignes) parallèles que sont, d’un côté Moïse (La rigueur de la Loi) et de l’autre Salomon (la Sagesse miséricordieuse)
Nul n’a mieux justifié l’évidente nécessité de la quête intime de soi (du Soi), que Shri Siddharameshwar Maharaj, le Grand Sage qui fit connaître son enseignement à Bombay de 1925 à 1936 et qui mourut dans cette ville en 1936. (Son enseignement est rassemblé dans un petit ouvrage intitulé « La clef de la réalisation de Soi » -publié aux Éditions Les Deux Océans, Paris)
Dans cet ouvrage le sens de la démarche initiatique est explicité avec l’humour et la simplicité qui caractérisent les « Grands Sages » :
« Pourquoi celui qui n’a pas cherché dans sa propre demeure cherche-t-il ailleurs ce qu’il a perdu chez lui ? L’homme qui affirme de façon péremptoire : Untel est ceci, Untel est cela, ne sait pas lui-même qui il est, et l’angoisse est son lot quotidien. À quoi sert-il de voir chez l’autre si on ne voit pas en soi-même ? »
Et encore :
« L’homme courageux part à la recherche du Brahman mais l’observé (ce qui est perçu) est l’obstacle qu’il rencontre sur son chemin. La plupart des chercheurs se heurtent à cette difficulté.
-Dans la foule du pèlerinage j’ai perdu mon propre Être et même en cherchant en moi, je n’ai pu le trouver. Je me suis alors rendu au poste police pour faire la déclaration de la perte de moi-même. Un employé s’approchant de moi me gifla si violemment que ma joue en devint toute rouge, il me demanda : Qui est ce gars-là ?-
Voilà la situation de celui qui étant le Brahman lui-même est à la recherche du Brahman. »
L’évidence ci-dessus rappelée par le sage, nous donne l’occasion de redire -à ceux qui, bien que se déclarant Francs-maçons, n’ont toujours pas compris le sens initiatique des trois degrés de la maçonnerie régulière- que la Franc-maçonnerie n’offre rien d’autre qu’un parcours initiatique, qui reconnaît la Présence de l’Esprit divin dans les divers plans corporels qui nous constituent, en nous invitant, partant du plus bas, à suivre et donc à remonter cette présence jusqu’à la Source de son jaillissement ; l’objectif étant de nous faire constater que notre Être véritable ne s’identifie à aucun des « corps » traversés, mais que c’est bien l’Esprit qui les anime tous car, sans l’Esprit, ces « corps » ne sont « Rien ».
Comme on le voit la quête du Soi ou de Notre Esprit, est l’unique raison de l’Initiation maçonnique. D’ailleurs, à quoi pourrait bien correspondre l’Initiation si ce n’est à cela ?
Vous êtes-vous demandé pourquoi la Franc-maçonnerie propose la pratique de rites initiatiques, alors qu’elle pourrait se contenter, tel un club quelconque, d’offrir une participation conviviale à une fraternité associative dont la vocation culturelle et philanthropique consisterait à venir en aide à l’humanité ?
À quoi bons des rituels initiatiques de la Franc-maçonnerie si ce n’est pas pour nous conduire vers la dimension spirituelle de notre véritable nature ?
Que venons-nous faire en Franc-maçonnerie si ce n’est pour découvrir et pour établir « la part divine » de notre humanité ?
Dès lors on ne soulignera jamais assez cette évidence : l’initiation maçonnique relève de la spiritualité car elle repose sur la croyance que l’Esprit est la meilleure part de nous-même.
C’est pourquoi la Franc maçonnerie n’a de sens (ne subsiste véritablement et n’a d’avenir) que si elle est initiatique, et plus précisément, que si elle initie de manière « effective » et non en « simulacre » ;
Que si elle propose à ses membres la découverte de la dimension d’Homme spirituel* (dit aussi Homme transcendantal) dont chacun est porteur dans sa caractéristique originelle d’homme.
* Rappelons si besoin était, que l’Homme spirituel, n’est pas synonyme d’homme savant, l’érudition n’étant pas, comme nous le savons (voir textes précédents), une qualification initiatique.
S’agissant de la situation actuelle de la GLNF -que par manque d’imagination ses détracteurs persistent à dépeindre calamiteuse- il est réjouissant de constater que les plus hauts dignitaires de la GLNF* s’attachent à réaffirmer la vocation initiatique prioritaire de l’institution renouvelée.
Il se confirme ainsi, qu’en parallèle avec la refonte statutaire en cours, la volonté de rétablissement de la vocation initiatique de la Franc-maçonnerie de la GLNF se propage sur le terrain, et s’accompagne de la volonté de voir relayer le plus largement possible cet état d’esprit, afin qu’il pénètre profondément les idées et les pratiques de tous les Francs-maçons, de toutes les Loges et de tous les dignitaires.
*Il fut spécialement réconfortant d’entendre, l’AGM P. J. prenant la parole en représentation du GM lors de la Tenue provinciale de Septimanie d’automne 2013, déclarer que l’objectif des Tenues de Grandes Loges de la GLNF, n’est pas de célébrer la gloire des Grands officiers ou des Grands Maçons, mais celui, nettement plus conforme à la mission de l’Ordre maçonnique, de rassembler des Hommes dignes, au sens noble du terme, dans une célébration fraternelle de l’Ordre initiatique.
Il fut aussi particulièrement réconfortant d’entendre plus récemment encore, le GO J.F. V., prenant la parole en représentation du GM lors de la Tenue provinciale de Septimanie de mars 2014, exposer que la réforme statutaire soumise au vote de l’assemblée extraordinaire d’avril prochain, a été pensée -et conduite dans la transparence, chaque membre ayant été mis en possibilité d’exprimer son avis- avec le souci constant de faire en sorte que la Grande Loge Nationale Française retrouve les fondamentaux de la Franc-maçonnerie initiatique traditionnelle, qui sont les siens depuis l’origine, et qui ont fait et qui feront à nouveau, de l’obédience, un modèle exemplaire et unique de régularité, dans le paysage maçonnique français.
Ces propos, venant de l’entourage immédiat du GM, et du GM lui-même (qui s’est exprimé dans diverses conférences internationales, et encore récemment en Hongrie à l'occasion d'une conférence des GL Européennes à Budapest sur le thème : « Generational problems and Masonic values in Europe »), attestent d’une rupture évidente avec les errements de la gouvernance passée qui, souvenons-nous, proposait que la GLNF rassemble ses « petits soldats » pour les combats mondains voulus par le chef suprême- perspective si grotesque et si antimaçonnique, qu’elle a valu à la GLNF, d’être sanctionnée par la GLUA.
N.B.1 : Dans l’esprit de la réforme et pour confirmation de la réorientation profonde de la Franc-maçonnerie de la GLNF, on prendra connaissance avec intérêt des textes publiés sur le site officiel de GLNF, dans sa partie ouverte au public. (GLNF : Grande Loge Nationale Française) On lira également, pour ceux qui ne l’ont pas encore fait, les statuts proposés au vote de l’assemblée extraordinaire d’avril prochain dont la cohérence maçonnique n’est pas discutable, pour autant bien sûr que sont écartés les référentiels « démocratiques » que les organisations irrégulières mettent en avant et dont on se demande en quoi ils seraient de bons critères pour juger du bien-fondé d’une institution maçonnique spirituelle*.
*Sauf à donner au démocratisme et au suffrage universel, une dimension transcendantale, que les adulateurs de la démocratie maçonnique ne peuvent accepter sans se retrouver en contradiction avec eux-mêmes.
N.B.2 : En Franc-maçonnerie régulière, l’exigence de spiritualité ne souffre ni l’équivoque, ni les tergiversations. C’est ce que vient de confirmer une nouvelle fois la GLUA, qui, à l’occasion de sa « Quarterly communication du 12 march 2014 » a fait savoir que l’orientation des nouveaux statuts de la GLNF était parfaitement conforme aux principes d’attribution de reconnaissance.*
*Rappelons que la GLUA ne désigne pas arbitrairement ses attributaires de reconnaissance, mais qu’elle « constate une régularité » par référence aux « basics principes de la Franc-maçonnerie traditionnelle »
Avec la sobriété qui caractérise les communications du « Board », la GLUA a donné un avis favorable à la réforme statutaire de la GLNF en annonçant que la réattribution de reconnaissance devient de ce fait une simple formalité qui va pouvoir intervenir rapidement après que « les membres de la GLNF (auront) approuvé des changements significatifs de leur Constitution et Règlement »
Dont acte par conséquent.
Pour la GLNF, cette annonce confirme que son GM J. P. S a su mener la réforme promise avec le doigté nécessaire, malgré un contexte difficile.
Pour les détracteurs de la GLNF, la déclaration de la GLUA retentit tel un coup de tonnerre, à la fois inattendu et sidérant.
Pour la CFM et surtout pour la GLAMF la pilule est amère ( et d’ailleurs ils se font discrets) -non pas parce qu’ils sont déçus, puisque mis à part quelques attardés, ils n’ont jamais cru à la possibilité d’obtenir une reconnaissance de régularité que leur situation d’allégeance prioritaire à « l’Ordre écossiste » leur interdit d’espérer- mais parce qu’ils pensaient tout de même que la GLUA mettrait plus de temps à se décider, et qu’ainsi le temps passant, leurs adhérents auraient digéré les boniments impossibles avec lesquels on les a fait marcher.
« La CMF va être reconnue. Il nous faudra peut-être accepter de faire une place à la GLNF au sein de la CMF, mais vu qu’elle est moribonde, et vu que nous sommes les meilleurs, cela se fera à nos conditions. Et d’ailleurs, ce que nous disons est si vrai que J.P. Servel a été obligé d’accepter le principe d’un ralliement à la CMF lors de la Conférence des Grandes Loges américaines de Baltimore en février dernier, etc. »
Avec la dernière déclaration de la GLUA, les GLAMF de base ont compris que leur nouvelle obédience n’obtiendra jamais la reconnaissance de la GLUA ; situation d’autant plus désespérante que le SCPLF, maître à penser de tout le système, ne leur offre aucune perspective de remplacement satisfaisante.
Reste, la catégorie (marginale mais active) des sympathisants glamfeurs restés en sous-marins furtifs à la GLNF (voire revenus en mission) qui nourrissaient les espoirs les plus fous quant à une prochaine reconnaissance de la CMF. Ceux-là se voyaient en situation de force au sein d’une GLNF dont les dirigeants allaient être contraints de passer par les fourches caudines de la GLAMF. Les illusions étant perdues, il est probable que quelques-uns d’entre eux vont partir. Quant aux autres, ils vont plonger en eau profonde pour essayer de se faire oublier.
Pour les Cinq Grandes Loges européennes enfin, le communiqué de la GLUA sonne le glas du « groupement européen » -à velléités ouvertement schismatiques vis à vis de la GLUA- qu’elles avaient envisagé de créer. Impossible désormais de reconnaître la CMF (sauf à se mettre au ban de la régularité anglo-saxonne) et impossible dès lors d’atteindre la « masse critique » nécessaire au projet.
Des réorientations douloureuses vont devoir intervenir, d’autant plus que ces Grandes Loges entrent en période de renouvellement de gouvernance obédientielle ; qu’il s’agisse de la Grande Loge d’Allemagne, de la Grande Loge Suisse Alpina, ou de la Grande Loge régulière de Belgique.
Décidément, la GLUA prend les décisions qui conviennent avec une précision redoutable.
(À suivre… La spiritualité, principe de la liberté et de la créativité de la Vie)
RAMINAGROBIS